Comment un si petit virus peut-il créer en moi autant de honte?
J’aimerais vraiment être tranquille. C’est vrai, j’ai passé peu de temps avec les enfants depuis le début de la journée. Du moins, mentalement. Je me sens quelque peu dans ma bulle. Je dirais même un peu, beaucoup. Comme tout le monde, je suis confinée à la maison. J’ai choisi d’aller à l’épicerie toutes les deux semaines et à un seul endroit. Il s’agit de ma seule sortie. Avec une famille de six, incluant quatre ados et deux adultes, je te jure que mon panier déborde!
Oui, j’ai la chance d’avoir du terrain et de pouvoir sortir dehors pour marcher.
Oui, contrairement à d’autres, je ne suis pas, pour le moment, inquiète financièrement. Même que je trouve qu’en demeurant à la maison, j’économise.
Oui, j’ai la chance d’être bien entourée avec ma famille. Je ne suis pas seule, âgée, malade ou sans famille. Même qu’un brin de solitude de temps en temps me fait vraiment du bien.
Et il est là, le problème.
J’ai honte!
Je me compare et j’ai honte!
C’est un problème et à la fois une solution.
Pendant que je me compare à ceux et celles qui vivent, à mon avis, des scénarios bien plus catastrophiques que ma situation, je tente de faire la forte, de dire que ça va bien aller, d’envoyer du positif aux gens, de les faire rire, de leur faire un coucou.
Ainsi, je suis authentique. Ça me fait vraiment plaisir et ça me rend heureuse de poser ces simples gestes.
Cependant, derrière tout ça se cache la honte.
La honte d’une femme qui, elle aussi, par moments, s’inquiète alors qu’elle se trouve chanceuse d’être dans sa situation.
La honte de celle qui, au lieu de passer du temps avec ses enfants, préfère, en ce moment, être dans sa bulle.
La honte et la peur d’oublier à nouveau que je suis vivante alors que d’autres personnes semblent tellement plus solides même en vivant des drames incroyables que je préfère ne pas entendre.
La honte de me rouler en p’tite boule lors d’une angoisse temporaire alors que franchement, je suis privilégiée.
Et c’est ça, le problème.
Je veux me montrer forte (Superwoman).
J’étouffe par instants la joie qui m’habite car je me dis que je ne peux être heureuse en ce moment alors que tant de gens souffrent. J’ai honte de me sentir joyeuse.
Mais surtout…
Je me mens à moi-même. Comment? En tentant d’étouffer les émotions qui surgissent à tout moment sous prétexte que je ne les crois pas légitimes.
Hier, en p’tite boule dans le banc de neige (oui, tu as bien lu!), j’ai décidé que je resterais là, immobile, tant et aussi longtemps qu’il le fallait.
Jusqu’à ce que j’aie complètement accueilli et accepté ce que je vivais.
J’ai accueilli cette inquiétude.
J’ai accepté ce besoin de solitude, d’être dans ma bulle.
J’ai accueilli cette honte de me plaindre alors que je crois que d’autres gens vivent des situations bien pires que la mienne.
J’ai accepté que mes beaux plans soient mis en suspens.
Je me suis accueillie dans les beaux côtés et aussi dans ce que je déteste de moi.
J’ai accueilli mon humanité.
Puis le soleil a percé les nuages.
J’ai recommencé à entendre les oiseaux chanter et l’écureuil siffler.
J’ai retrouvé la paix et le calme intérieurs.
Je me suis retrouvée en prenant soin de cette connexion à moi.
Puis je me suis finalement relevée, une fois de plus, avec la confiance absolue que chaque fois que je tomberai, j’aurai le courage d’accueillir ce qui est, d’accepter qui je suis.
Avec la certitude que j’aurai le courage de me relever, plus forte… ou pas.
Cela a peu d’importance.
Ma seule et véritable mission, c’est d’être moi. Et être moi, c’est, entre autres, reconnaître, accueillir et vous montrer que comme tout le monde, je vis aussi parfois des instants de doute, de peur et de drame intérieur.
Je t’invite, toi aussi et malgré ta force et ta belle capacité d’adaptation, à accueillir ce qui est là au présent, à te reconnaître, à t’envelopper de compassion et t’aimer, peu importe la situation ou comment tu te sens.
Josée Mercier
Comments